Allée Taine Quartier du Triolo 1975 , une représentation de ce qu'a pu être une fête de Quartier à l'époque des 1ères arrivées d'habitants. (Ph.originale P.Bruyelle / générée par l'IA) |
Dans le contexte économique et social actuel, il est difficile de dissimuler une certaine lassitude, une impression d’avoir, au fil des années, perdu une part de notre âme dans une ville que certains ont connue nouvelle, innovante, et intimement tournée vers le vivre-ensemble.
Les habitants qui suivirent, ou arrivés plus récemment, ne ressentiront pas ce même manque, mais percevront parfois une ville sans caractère, impersonnelle, marquée par l’individualisme. Ce qui contraste avec un passé qui a vu naitre des vocations de leaders locaux issus du militantisme (syndical, associatif, politique) émergent pour porter la parole collective et mobiliser autour des défis (logement, malfaçons…).
Mais ce constat n’est pas propre à Villeneuve d’Ascq : il s’inscrit dans un phénomène plus large, national — voire générationnel. Aujourd’hui, les opérations de réhabilitation se multiplient, signe que la ville accuse le poids de ses cinquante années d’existence. Il ne s’agit pas de revenir en arrière — comme certains le suggèrent avec nostalgie en affirmant que « c’était mieux avant » —, mais plutôt de construire une continuité esthétique et humaine, en valorisant ce qui subsiste de son esprit d’origine, notamment les nombreux espaces verts qui, heureusement, ont été préservés.
Lorsque les premiers habitants s’installent à Villeneuve d’Ascq dans les années 1970, ils rejoignent une utopie urbaine née d’un projet national ambitieux : créer une "ville nouvelle", pensée pour offrir un cadre de vie harmonieux entre habitat, emploi, nature et culture. Loin de la ville tentaculaire et désordonnée, Villeneuve d’Ascq se construit selon des principes modernes de mixité sociale, d’équilibre entre zones résidentielles et zones d’activités, L’urbanisme y est pensé pour encourager la rencontre : interdiction de clôtures, chemins piétonniers favorisant les croisements imprévus.
On y facilite l'accessibilité à l’enseignement supérieur avec l’implantation massive de facultés et grandes écoles (comme l’Université de Lille, Polytech Lille ou Centrale Lille). Très vite, la population croît rapidement, attirée par un cadre de vie verdoyant, une offre d’emploi dynamique et la promesse d’un "vivre ensemble" pacifique et solidaire. Pendant les deux
premières décennies, cet idéal semble prendre vie : des quartiers comme Triolo, Résidence, ou Cousinerie symbolisent ce modèle de cohabitation sociale réussi.
Cependant, à partir des années 1990-2000, cette entraide collective se normalise , voire se neutralise presque complètement.
la ville connaît une lente mais certaine dégradation de ses conditions de vie dans plusieurs quartiers. si Les manifestations ponctuelles marchés, braderies, fête des aînés et bien d'autres sont toujours présentes, les plus importantes à organiser ont disparu comme les 24h de la Cousinerie.Si les zones d’activités continuent de croître — notamment autour du parc scientifique de la Haute-Borne ou du centre commercial V2 — l’humain semble parfois relégué au second plan. Dans certains secteurs comme Pont-de-Bois ou Résidence, la population se précarise, les équipements vieillissent, et les tensions sociales augmentent.
L’insécurité devient une préoccupation croissante, avec une hausse des incivilités, de la petite délinquance et une perte de lien social. Selon les chiffres de la préfecture, les faits de violences volontaires ont connu une augmentation notable entre 2010 et 2020 dans plusieurs quartiers populaires. Les grands ensembles, initialement conçus comme des lieux de mixité, peinent à remplir leurs promesses : certains habitants se replient sur eux-mêmes, d'autres s'exilent vers des communes voisines.
Ce qui a profondément changé à Villeneuve d’Ascq, c’est la nature du lien social. Là où régnait un fort esprit communautaire et une solidarité de voisinage (associations de quartier, fêtes
collectives, jardins partagés), on observe aujourd’hui une forme de fragmentation sociale et territoriale. Ce délitement est d’autant plus marquant qu’il contraste avec les premières années où l’espoir d’une ville modèle unissait les habitants. Si certaines poches de la ville, comme les quartiers étudiants ou les zones pavillonnaires, conservent une qualité de vie appréciable, d’autres souffrent de cette inégale évolution.À partir des années 2000, ces initiatives se raréfient, particulièrement dans les quartiers prioritaires. La multiplication des incivilités et l’isolement social fragilisent la cohésion.La montée de la précarité dans certains quartiers (pont-de-Bois, Résidence), avec un taux de chômage au-delà de 16 % en 2021 (chiffre métropolitain), contribue à la dégradation du lien social .
Contre toute attente, l'image globable de la ville n'en souffre pas, malgré une croissance du parc immobilier ( et universitaire) mais surtout grâce à la dominance de ces espaces verts, de ces équipements, de son dynamisme associatif qui perdure, on en retient l'aspect d'une ville riche de potentiel, où la mémoire du "vivre ensemble" des débuts continue d’inspirer certaines initiatives citoyennes. Il reste aujourd’hui à repenser l’équilibre entre développement économique, qualité de vie et cohésion sociale pour redonner à cette ville nouvelle la promesse de son idéal fondateur.
Mais ce constat n’est pas propre à Villeneuve d’Ascq : il s’inscrit dans un phénomène plus large, national — voire générationnel. Aujourd’hui, les opérations de réhabilitation se multiplient, signe que la ville accuse le poids de ses cinquante années d’existence. Il ne s’agit pas de revenir en arrière — comme certains le suggèrent avec nostalgie en affirmant que « c’était mieux avant » —, mais plutôt de construire une continuité esthétique et humaine, en valorisant ce qui subsiste de son esprit d’origine, notamment les nombreux espaces verts qui, heureusement, ont été préservés.
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2020 - Quartier du Pont de Bois - Chemin des Visiteurs En a.p : Le nouveau centre Social . |
On y facilite l'accessibilité à l’enseignement supérieur avec l’implantation massive de facultés et grandes écoles (comme l’Université de Lille, Polytech Lille ou Centrale Lille). Très vite, la population croît rapidement, attirée par un cadre de vie verdoyant, une offre d’emploi dynamique et la promesse d’un "vivre ensemble" pacifique et solidaire. Pendant les deux
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2020 Quartier du Triolo Les Résidences étudiantes Tremières (Anciens locaux France Telecom) en face un chantier de logements mixtes. |
la ville connaît une lente mais certaine dégradation de ses conditions de vie dans plusieurs quartiers. si Les manifestations ponctuelles marchés, braderies, fête des aînés et bien d'autres sont toujours présentes, les plus importantes à organiser ont disparu comme les 24h de la Cousinerie.Si les zones d’activités continuent de croître — notamment autour du parc scientifique de la Haute-Borne ou du centre commercial V2 — l’humain semble parfois relégué au second plan. Dans certains secteurs comme Pont-de-Bois ou Résidence, la population se précarise, les équipements vieillissent, et les tensions sociales augmentent.
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1983 Quartier Hôtel de ville - Station Métro face entrée Sud Centre Commercial V2 |
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1978 Quartier Pont de Bois - Ilot 4 Arch. Josic |
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1975 Les premiers ouvrages du Quartier Cousinerie - "Maisons Bâtir" rue de la Cimaise |
Contre toute attente, l'image globable de la ville n'en souffre pas, malgré une croissance du parc immobilier ( et universitaire) mais surtout grâce à la dominance de ces espaces verts, de ces équipements, de son dynamisme associatif qui perdure, on en retient l'aspect d'une ville riche de potentiel, où la mémoire du "vivre ensemble" des débuts continue d’inspirer certaines initiatives citoyennes. Il reste aujourd’hui à repenser l’équilibre entre développement économique, qualité de vie et cohésion sociale pour redonner à cette ville nouvelle la promesse de son idéal fondateur.
ref. bibl "Utopies et mythologies urbaines à Villeneuve d’Ascq" Bénédicte Lefebvre, Michel Rautenberg - Presses Universitaires du Septentrion, 2010.